Henri POUILLOT
Guerre d’Algérie, Colonialisme...
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Ma lettre à Nicolas Sarkozy du 2 Avril 2008

Objet : Mémoire(s) de la Guerre d’Algérie - Honneur de la France.

Article mis en ligne le 22 juin 2010
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Monsieur le Président :

Objet : Mémoire(s) de la Guerre d’Algérie

Honneur de la France.

Ancien témoin de la Guerre d’Algérie, miraculé ayant échappé à un attentat FLN et deux attentats de l’OAS, je me permets d’intervenir auprès de vous pour vous faire part de mes inquiétudes sur une dérive qui semblerait se dessiner et aurait des conséquences graves. Depuis plusieurs années une certaine forme de l’apologie du colonialisme se développe, une résurgence de l’activité d’anciens de l’OAS s’opère au grand jour. Une "guerre" des mémoires se développe, attisée par des décisions d’élus (maires, députés…) ou des non décisions des plus hautes autorités de l’Etat (secrétaires d’Etat, Ministres, Présidence de la République…) acceptant que des honneurs soient rendus sur l’espace public à ceux qui pendant la Guerre d’Algérie ont voulu renverser la République Française, et en particulier à ceux qui ont été condamnés à mort, et exécutés pour leurs crimes.

Il semble que vous soyez sensible à ces questions puisque vous êtes intervenu à plusieurs reprises sur ces sujets. Vous avez répondu à des organisations de rapatriés. Vous vous êtes exprimé dans plusieurs discours, que ce soit à Toulon, Dakar, Constantine… Je suis d’accord avec vous qu’il n’est pas question, pour la France, de repentance, d’ailleurs personne ne la demande. Il devrait s’agir d’une réelle reconnaissance des crimes contre l’Humanité (tortures, viols, exécutions sommaires, villages rasé au napalm…) commis au nom de la France et de leur condamnation pure et simple. Comment donner des leçons sur les questions de "Droits de l’Homme", tant que notre pays, qui a failli dans ce domaine, se refuse à cet examen de conscience. L’Honneur de la France l’exige.

Depuis plusieurs années des responsables politiques, maires de grandes villes,… ont accepté, voire aidé à l’érection de stèles scandaleuses, "glorifiant" quatre "héros" : Jean-Marie Bastien-Thiry, Roger Degueldre, Claude Piegts et Albert Dovecar. Ces quatre individus ont été condamnés à mort et exécutés pour leurs crimes. Ces terroristes ont assassiné des inspecteurs de police, des militaires, des civils (plusieurs milliers)… ont tenté d’assassiner le Président de la République lui-même à deux reprises, ont tenté de renverser la République. Que les élus républicains cautionnent tacitement ou participent directement à ces honneurs honteux remet gravement en cause les principes républicains eux-mêmes. Comment demander ensuite, par exemple à la jeunesse, de respecter la police quand les drapeaux tricolores s’inclinent sur la tombe des assassins d’un commissaire central de la Police au chant de la Marseillaise ? Comment demander à des jeunes de se comporter avec respect des institutions républicaines quand elles sont bafouées de la sorte ?

Le 26 mars 2008 une nouvelle démonstration honteuse s’est déroulée à l’Arc de Triomphe de Paris. Les anciens de l’OAS (cette organisation terroriste qui tenta de renverser militairement la République Française en 1961/62) ont été autorisés à parader à l’Arc de Triomphe pour raviver la flamme du Soldat Inconnu. Malgré l’alerte donnée par de nombreuses organisations (1) et leurs protestations, malgré les nombreuses interventions effectuées auprès des Ministères, du Président du Comité de la Flamme, du Président de la République,… appelant à la morale publique, à la raison et à la dignité de la République devant l’annonce de la manifestation organisée à l’Arc de Triomphe le 26 mars à 17 heures par d’anciens activistes de l’OAS, les Autorités de l’Etat ont laissé se dérouler ce scandale. La Préfecture de police a déployé un service d’ordre conséquent pour empêcher l’expression de protestation des associations. Seul un jeune manifestant criant "OAS Assassins !" a été contrôlé.

Le Président de l’association qui a obtenu le ravivage de la flamme n’est autre que Claude Rochette, ancien déserteur qui fut l’un des responsables du Maquis de l’Ouarsenis, cette organisation militaire de l’OAS dont l’objectif était de rééditer un nouveau putsch après l’échec de celui d’avril 1961. Armand Belvisi, bras armé du commando dirigé par Bastien-Thiry (ce commando qui organisa deux attentats contre le Général de Gaulle, alors Président de la République), paradait dans le groupe de ces nostalgiques qui iront ensuite fouler au pied l’appel du 18 juin 1940 gravé sur la dalle où se trouve la tombe du Soldat Inconnu. L’ADIMAD-OAS (dont le président Jean-François Collin -sous le nom de code Valentin- est l’un des membres du commando qui tenta par deux fois d’assassiner sur son lit de l’Hôpital du Val de Grace le résistant Yves Le Tac) a donc incliné son drapeau tâché de sang en ce lieu symbolique. La démonstration a bien été faite, malheureusement, que cette manifestation était réalisée par ces anciens activistes de l’OAS. Cet ancien sous-lieutenant du groupement des parachutistes avait participé à la prise du Palais d’Eté au soir du 21 avril 1961 (le début de ce putsch qui tenta de renverser la République), avant d’intégrer le Maquis de l’Ouarsenis.

Ce comportement officiel est absolument scandaleux, car il est complice d’une violation de la mémoire des militaires et des fonctionnaires de l’état qui ont payé de leur vie leur loyauté à l’égard des institutions républicaines, une exploitation des douleurs de rapatriés, une insulte au lieu de la Mémoire combattante républicaine que représente la tombe du Soldat Inconnu, et l’appel du 18 juin 1940.

Même si les membres de l’OAS ont bénéficié de l’Amnistie, leurs crimes demeurent.

Sur mon site, vous pourrez trouver toute une série d’informations relatives à la résurgence de l’OAS aujourd’hui, dans le chapitre qui lui est consaccré.

Des rumeurs circulent selon lesquelles vous sembleriez favorable à attribuer très prochainement le titre de reconnaissance "Mort pour la France" aux victimes des manifestations du 26 mars 1962 à Alger ou du 5 juillet 1962 à Oran. J’ose espérer qu’il n’en est rien. Comment, sinon, justifier que ceux qui sont tombés sous les balles de soldats Français pourraient être "Morts pour la France". Oserait donc dire par ce geste que l’Armée aurait commis un acte de rébellion contre l’Etat, la République Française ? N’inversons pas les rôles : c’est l’OAS qui a tenté de renverser les institutions républicaines. Les manifestants répondaient à une incitation de rébellion contre la France, contre les accords signés pour le rétablissement de la Paix en Algérie. Ce sont les responsables OAS qui ont organisé les provocations à l’origine de ces massacres. Certes une partie de la population s’est laissée abuser par ces fascistes, et ont été leurs victimes.

Vous trouverez sur mon site une vidéo d’un extrait de reportage tourné en 1962 qui confirme bien la responsabilité des tireurs embusqués sur les toits de la rue d’Isly à l’origine du déclanchement de la fusillade.
Une telle démarche de la reconnaissance de "Mort pour la France", dans ces conditions, serait aussi négationniste que celle qui a consisté, pour certains sans scrupules quant à la vérité historique, à nier les chambres à gaz pendant la seconde guerre mondiale. Ce serait un terrible affront de la France à ses enfants, qui eux, sont réellement morts pour leur pays, pour leur attachement aux valeurs de notre République.

Je tiens à vous faire part également d’une exigence de première importance que partagent une majorité de Français : c’est que disparaissent des espaces publics (places, cimetières…) les stèles, monuments rendant hommage aux anciens tueurs de l’OAS condamnés à mort et exécutés pour leurs crimes. Il serait judicieux qu’une plaque puisse commémorer la mémoire des milliers de victimes de l’OAS.

J’en appelle à la dignité de votre charge de Président de la République pour que vous preniez les dispositions afin d’interdire toutes ces manifestations publiques qui sont une insulte à la République, à l’Histoire. Un certain nombre de sites devraient également être interdits, poursuivis par le ministère public, en particulier celui de l’ADDIMAD-OAS qui fait l’apologie de criminels. Il est temps que l’Etat prenne les mesures pour que ne soit pas attisée une guerre des mémoires, par cette réhabilitation rampante de l’OAS.

Veuillez agréer, Monsieur le Président, mes plus respectueuses salutations.

Henri POUILLOT

Parmi ces organisations : l’ANPROMEVO (Association Nationale pour la protection de la mémoire des victimes de l’OAS), l’AFASPA (Association Française d’Amitié et de Solidarité avec les Peuples d’Afrique), Au nom de la Mémoire, Comité Vérité et Justice pour Charonne, France Algérie, la LDH, le MRAP, Harkis Droits de l’Homme, Le collectif Anticolonial.org, l’ARAC (Association Républicaine des Anciens Combattants), Les Amis de Max Marchand Mouloud Féraoun et leurs amis, Le Groupe Communiste de Paris…

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Dès que je la recevrai, je publierai votre réponse. Hélas, toujours pas de réponse...

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